1947, partition de l’Inde. Turtuk, au fin fond de la vallée de la Nubra, est pakistanais. En 1971, avec la guerre, il devient un village indien. En trois jours, les Pakistanais doivent lever le camp. Beaucoup de familles sont séparées. Les montagnes enneigées, que l'on voit aisément depuis Turtuk, appartiennent encore au Pakistan. Deux villages sont situés à cet endroit, en plus du poste militaire.
Turtuk est donc le village indien le plus au Nord du sous-continent. Pour ses habitants, il est interdit d’aller au Pakistan. Ils ne peuvent pas rendre visite à leurs proches restés là-bas, à seulement quelques kilomètres. Pour se retrouver, les Pakistanais et les Indiens de la même famille doivent donc se réunir dans le Pendjab, du côté du poste frontière d’Attari-Wagah, à des milliers de kilomètres de là. Les Pakistanais ont le droit de téléphoner, mais c’est défendu aux Indiens. Alors, ils communiquent grâce à Internet.
Pourtant, ils semblent avoir accepté leur condition. Le gouvernement leur a construit une route, leur fournit de l’électricité et leur permet d’accéder à des postes de fonctionnaires. Et puis, ils ne connaissent que trop bien la situation délicate entre les deux pays.
De l’autre côté de la rivière de Turtuk, depuis 2010, les Occidentaux n'ont que le droit de parcourir un kilomètre. Avant, les touristes Indiens avaient le droit de trecker jusqu’à Srinagar. Les locaux, eux, peuvent encore s'y rendre pour faire paître leurs bêtes.
L’hôtelier nous raconte l’histoire d’un ressortissant Pakistanais qui a vécu au Canada toute sa vie. Lorsque sa mère, devenue indienne en 1971, est morte à Turtuk, il a été bloqué à Leh pendant deux mois et n’a pas pu assister aux funérailles. Sa famille a dû se déplacer pour les retrouvailles.
Turtuk est l’un des seuls villages baltis d'Inde, avec deux autres situés vers Kargil. Les Baltis, un groupe ethnique d'origine tibétaine, ont perdu tous leurs écrits. Leur langue se transmet uniquement à l'oral et l’ourdou est utilisé à l’écrit. Ils sont un demi million en tout. On trouve d’autres villages baltis dans les montagnes du Nord du Pakistan. Bien que musulmans, ils ont une culture totalement différente de celle des Ladakhis musulmans.
Il s’en passe des choses dans les ruelles du haut Turtuk. Les fillettes hautes comme trois pommes, les adolescentes rieuses et les femmes travailleuses sont voilées de mille couleurs. Elles vont récupérer l’eau dans les rues, dotées d’un excellent système d’irrigation, qui sert aussi aux cultures et à la toilette. Les enfants mangent leurs chapatis. D’autres vont à l’école communale, en caressant les épis de blé sur leur passage. Les habitants vivent du travail de la terre. Les cultures poussent dès mars. Contre toute attente, il n’y a que cinq fois de la neige en hiver ! Et les pires températures oscillent entre - 10 et - 20 degrés, ce qui n’est pas si rigoureux pour le Ladakh.
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